Toute fine, toute légère…

écharpe soie tissée main

… non, ce n’est pas de moi que je parle 😀 ! Mais de l’écharpe que je viens de terminer avec la soie de mawatas filée lors de mon dernier marché.

En fait, même avec le peigne 60/10 que j’attendais impatiemment de pouvoir étrenner, le fil était encore trop fin, ce qui m’a permis de tisser une véritable gaze de soie, un petit bonheur de luxe et de douceur. Elle ne pèse qu’une soixantaine de grammes, bien qu’elle fasse ses deux mètres de long, et n’a utilisé que la moitié de la pelote… Je suis en pleine réflexion, vous vous en doutez, au sujet de ce que je vais faire de l’autre moitié.

Je me suis demandé avec Chantal, qui s’étonnait de sa finesse, si elle passerait à travers une bague, comme les fameux pashminas ou encore les châles orenbourg qui doivent passer à travers un anneau de mariage. Eh bien, oui, la preuve en image, elle y passe, et au large encore !

Vous le voyez, en ce moment, je suis totalement dans l’inspiration “Noël blanc”…

Bilan d’un marché parisien

filage manuel

Me voici de retour du marché des créateurs des Champs-Élysées, dont j’ai eu parfois l’impression qu’il n’avait de “créateur” que le nom… En effet, le petit “village des créateurs” était noyé dans une grande fête foraine où les gens venaient manger des churros, boire du vin chaud et filmer leurs enfants sur les manèges. Une atmosphère certes “festive”, mais qui ne poussait pas à admirer les créations minutieusement réalisées par les quelques artisans qui n’étaient pas en fait des revendeurs de bricoles.

Parmi ces derniers, j’ai tout de même eu le plaisir de faire la connaissance du sculpteur céramiste Benoist Lagarde (et aussi de faire quelques emplettes, hum ! je ne sais pas résister à un bel émail rouge…).

Et, si parmi les milliers de personnes venues du monde entier qui sont passées devant mon stand durant cette semaine, la plupart n’avaient certainement pas l’esprit à l’artisanat ou à la création, je ne saurais compter combien ont été étonnées ou émues par mon petit rouet qui a pédalé sans relâche, dix heures par jour ou presque. J’ai fait beaucoup de très belles rencontres et je ne saurais remercier assez tous ceux qui m’ont confié une bribe de leur histoire personnelle, évoqué un membre de leur famille, les pratiques d’antan de leur village ou de leur région. Ils m’ont touchée autant qu’ils l’ont été.

Merci donc aux ados qui ont sauté en l’air en jurant que c’était “trop stylé”. Merci aux vieilles dames qui m’ont raconté leurs longues heures de tissage, petite fille, dans un atelier portugais, ou qui ont évoqué la difficulté à redécouvrir le filage par nécessité, pendant la Seconde Guerre mondiale, alors qu’elles étaient adolescentes. Merci à ce monsieur moldave d’une suprême élégance qui a expliqué la fabrication des tapis dans son village, et la fierté avec laquelle les dames qui en étaient chargées acceptaient ou non de vendre leurs créations à telle ou telle personne. Merci à tous ces jeunes hommes fascinés par les roues et les courroies, que leurs amies essayaient d’entraîner à la force de leurs petits poignets vers les stands de bijouterie. Merci au garçon de café qui a mimé pour moi les gestes de sa grand-mère : le cardage et le filage au fuseau. Merci à tous ceux qui ont demandé mon autorisation avant de prendre des photos…

Pendant toutes ces rencontres enrichissantes, si mon cerveau était aux prises avec un anglais un poil rouillé à l’oral et des notions d’espagnol franchement décaties, mes mains et mes pieds, eux, ne chômaient pas ! Voici, en chiffres, les quatre écheveaux filés au cours de ces belles journées (j’ai réalisé les retors chez moi, en rentrant, et je vous donne là le temps total passé sur chaque écheveau) :

– laine et soie : 478 m pour 126 g, 12 heures de filage ;

– mawatas de soie : 1 408 m pour 123 g, 37 heures de filage ;

– laine et soie : 587 m pour 128 g, 16 heures de filage ;

– mérinos superwash : 160 m pour 102 g, 4 heures de filage.

J’ai tout filé en blanc car c’est plus visible lorsqu’on fait une démonstration, mais rien ne m’empêchera de me livrer à quelques exercices de teinture… L’écheveau de mawatas est déjà en cours de tissage, argh, le peigne 60/10 fraîchement reçu d’Ashford est encore trop gros ! Cela donne toutefois un effet “gaze” qui pourrait être très réussi. Mais j’aurais dû retordre ce fil trop fin en navajo, il aurait eu une plus jolie texture. À refaire…

“Mon livre de chevet”

filage soie mawatas silk hankies

Vous avez été nombreux à admirer ma collection “Ma tasse de thé”, inspirée des arts de la table, et je vous en remercie.

Cette année, j’ai décidé de chercher l’inspiration ailleurs et je me suis tournée vers un autre de mes amours, la lecture. Rien n’est plus précieux qu’un beau livre, rien de plus inspirant non plus. Je vous présente donc ma collection “Mon livre de chevet”.

Ce mois-ci, je voulais vous faire découvrir une magnifique édition du Soie d’Alessandro Baricco, superbement illustrée par Rébecca Dautremer. Faut-il le préciser ? Naturellement, l’écheveau est en soie, plus exactement en mawatas (mouchoirs de soie aussi appelés silk hankies) dont je savoure toujours avec bonheur la fausse rusticité et le filage très particulier.

“À sa femme Hélène, il offrit en cadeau une tunique de soie que, par pudeur, elle ne porta jamais. Si tu la serrais dans ton poing, tu avais l’impression de ne rien tenir entre les doigts.”

Soie, Alessandro Baricco

filage soie mawatas silk hankies

Mawatas façon “Lagon bleu”

filage mouchoirs soie mawatas silk hankies

C’est avec un thème très simple que j’ai défié ce mois-ci les fileurs et fileuses du forum Tricotin : je leur ai proposé de nous faire découvrir un de leurs coups de cœur en matière de filage, que ce soit une technique, une matière, une couleur… Il s’agissait d’évoquer quelque chose qui a depuis longtemps leur préférence, ou qu’ils ont découvert récemment et qui les a séduit(e)s.

Celles et ceux d’entre vous qui me connaissent le mieux savent vers quel plaisir coupable vont mes élans envers et contre tous : les mawatas. Oui, je sais ce que vous allez me dire, ces “mouchoirs de soie” coûtent cher, ne sont pas très pratiques à teindre, demandent un temps de préparation assez long et font mal aux doigts lors du filage. Tout cela est vrai ! Je dois être un peu masochiste !!

Mais j’adore l’intensité et la rapidité avec laquelle ils prennent la couleur (dès lors qu’on les a très, très longuement gavés d’eau…) ; j’adore leur texture, un fil brillant parcouru de bouloches duveteuses, qui donne toute son originalité sauvage au chantoung ; j’adore leur solidité à toute épreuve… qui permet de faire du fil vraiment très fin sans se demander s’il va casser.

Voici donc un fil dentelle à deux brins faussement rustique : oui, il est texturé et irrégulier, mais c’est du 100% soie, donc brillant et doux, avec un beau tomber.

“Prickly Rose”, un fil de luxe

filage mawatas silk hankies

J’avais besoin d’une star dans ma boutique ! Il m’a fallu plus de 50 heures de travail pour venir à bout de cet écheveau… Je me suis inspirée de la fleur “Prickly Rose” et c’est donc ainsi que je l’ai baptisé, mais il aurait tout aussi bien pu s’appeler “Patience”, vu le temps que j’ai mis à filer et retordre ces 150 g de mawatas (aussi nommés mouchoirs de soie ou silk hankies). Je suis tout de même contente du résultat (presque 1 500 m), qui permettra de tricoter un grand châle tout entier sans avoir à faire un seul nœud ni raccord. La texture un peu rustique des mawatas me plaît aussi, elle permet d’apporter à ce fil de l’originalité sans perdre les avantages de la soie : brillant, douceur, tomber. La couleur a été difficile à rendre en photo, ce n’est pas réellement un uni : le rose a de légères nuances cuivrées. Je me demande si l’acquéreur voudra le tricoter ou le tisser, car le fil est archisolide et ira aussi bien en chaîne qu’en trame ; les “grumeaux” dus à la texture des mawatas rendraient bien en tissage, je pense.

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“Fête des roses”

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Une des plus belles fêtes traditionnelles de mon Maroc natal, c’est, à la fin du printemps, la fête des roses de Kelaa des M’Gouna. L’image la plus impressionnante ? Les gros camions déchargeant devant la distillerie des tombereaux de pétales odorants, qui serviront à confectionner l’eau de rose la plus parfumée qui soit – un hydratant naturel pour la peau, mesdames ! Et une source de bien-être sans fin quand on s’en passe quelques gouttes sur le visage.

C’est cette avalanche de multiples tons de rose que m’évoque ce fil, tombé du rouet pendant mes vacances… d’où sa présentation dans la verdure. Eh oui, j’ai eu la grande chance de pouvoir emmener en vacances mon cher rouet ET mon matériel de feutrage, grâce à l’entêtement de mon Homme qui a réussi à tout caser dans la voiture…

Mais c’est Lululibellule qui m’a envoyé ces “mawatas” teints par ses soins avec des teintures Dupont. Elle n’aimait pas le côté accrocheur de la fibre… tout bénéfice pour moi, qui en ai profité, hé hé… Ce côté accrocheur permet en tout cas de filer très fin. La preuve : cet écheveau fait un peu plus de 500 m pour 36 g, en retors najavo, ce qui signifie que le célibataire faisait probablement plus de 1,5 km ! Avec des petites bouloches ici et là pour lui donner le côté “tweedé” que j’adore.

filage filage

Avalanche de mawatas !

Dans la lignée de mon fil “Poule faisane”, voici quelques écheveaux 100 % soie obtenus à base de mawatas (mouchoirs de soie) teints à la peinture sur soie Dupont… Si vous êtes bien sages, je vous montrerai très bientôt ce que je suis en train d’en faire !!!

Le fond d’la piscine

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Menthe à l’eau

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Granite

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Rouille d’enfer

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Poule faisane

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C’est le plumage de cet oiseau que m’évoquent les tons de ce fil 100 % soie. J’avais envie, depuis que j’en ai entendu parler sur le Forum du filage, de tester les fameux “mouchoirs de soie”… qui n’en sont d’ailleurs pas. Ces mawatas sont en fait des cocons de soie étirés et empilés pour former des sortes de “paquets de mouchoirs” qu’on effeuille pour les filer… ou pour les tricoter tels quels, au choix. J’ai choisi l’option filage.

Pour cet essai, j’ai utilisé deux “paquets” de mouchoirs (15 grammes) trouvés chez Alysse. Je les ai teints aux peintures pour soie Dupont et Sennelier : après les avoir mouillés et légèrement essorés à la main, j’ai “posé” des taches de peinture non diluée au pinceau, dans des tons de rose et de brun.

Une fois qu’ils ont été fixés au micro-ondes, rincés et séchés, j’ai filé les “mouchoirs” assez fin après les avoir effeuillés, percés au milieu et étirés ; c’est un mouvement rapide, facile et agréable.

Vu la finesse et la solidité du fil, irrégulier avec des petites bourres qui me plaisent beaucoup, j’ai tenté le retors navajo ! Le résultat me plaît beaucoup. Il y a environ 78 mètres pour 15 grammes.